TDAH et culpabilité

 

(Attention, le début de cet article comporte des détails assez gore sur la description d'un rêve.)


J
e trouve que les rêves, c'est souvent un bon indicateur de ce par quoi on passe dans notre vie. Dernièrement, j'en ai fait un d'assez particulier où je devais me faire opérer du cerveau. Opération bénigne mais qui me faisait pas mal flipper. Après avoir eu la tête rasée, je devais, comme pour toute opération du cerveau, rester éveillée. Puis quelques dizaines de minutes plus tard, je me sens glisser de la chaise sur laquelle j'étais assise et me suis retrouvée à moitié avachie par terre. Personne ne s'occupait de moi.
La chirurgienne m'a dit alors que tout était fini, que je pouvais me relever et m'en aller. J'ai à peine eu le temps de me relever et de la voir s'en aller que j'ai senti un truc visqueux tomber de ma tête. C'était mon scalp. On m'avait mis des vis défectueux sur le crâne qui étaient censés me maintenir mon scalpe le temps que la peau se cicatrise. Alors, j'ai déambulé dans tout l'hôpital vide, mon scalp dans les mains, en réclamant de l'aide. Une personne à l'accueil m'a répondue: 
"- Vous comprenez, on est débordés!"
Et je me suis entendue répondre:
"- Oui, je comprends. Je veux surtout pas déranger, c'est juste que j'ai le crâne visible et j'ai peur qu'il m'arrive quelque chose."

À mon réveil, j’étais quelque peu perplexe.
Je me suis demandé si, dans la réalité, même blessée à mort, je tiendrais les mêmes propos.
À une moindre échelle, il y a quelques années, j’ai eu un malaise dans le bus qui m’a laissée KO quelques minutes. Quelqu’un a appelé les pompiers et, lorsqu’ils sont venus, je n’ai pas arrêté de m’excuser de les avoir dérangés pour un simple malaise.
Je culpabilise même quand je vais chez ma médecin. Je vois qu’elle est tellement surmenée que je m’en veux d’être là à lui parler de mon TDAH et de ma maladie de Hashimoto, alors qu’il y a sans doute d’autres personnes qui auraient, à mes yeux, plus besoin d’elle que moi.
Oui, oui, vous m’avez bien lue. À 38 ans, j’en suis toujours là. Comme si avoir un TDAH, et comprendre à quel point ce trouble peut être un sérieux handicap, ne suffisait pas, je continue à entretenir ces réflexes de honte : la honte de demander de l’aide, même quand j’y ai droit. Je me sens toujours coupable de pouvoir bénéficier d’une écoute légitime, d’un accompagnement, d’un soutien. Quand j’envoie un message en ce sens, j’agis malgré la honte. Je m’imagine que, de l’autre côté, la personne sera sûrement agacée que la mère Belmas demande encore de l’aide.
Je lutte souvent contre cette pensée de ne pas être légitime à recevoir du soutien. Je dirais que c'est l’un des inconvénients d’un diagnostic TDAH posé tardivement : parmi les choses qui ont la peau dure, il y a la honte et la culpabilité.
Par moments, je croyais m’être débarrassée de ces parasites, mais malheureusement non. Il y aura encore des périodes comme ça, qui dureront. Je ne peux pas régler en une année l’ensemble d’une vie passée à entretenir, consciemment ou non, un mécanisme d’auto-validisme trop bien huilé par l’environnement. Parfois, pousser un coup de gueule ou dessiner une petite BD, ce sont des cailloux semés sur le chemin pour m’alléger de tout ça. Mais la route est longue.


Quand je pense à ce rêve complètement fracassé, je réalise à quel point il révèle encore ma tendance à m’effacer, simplement par honte ou par crainte de déranger les autres et de les décevoir et que c'est franchement révoltant.

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