Santé mentale, TDAH et pseudosciences : pourquoi l’esprit critique est vital


Avertissement : je ne suis qu’une personne lambda qui émet une opinion. Je ne suis pas professionnelle de santé, mais une personne concernée par le TDAH, et je souhaite partager mon point de vue pour inviter à penser, réfléchir, et peut-être même remettre en question nos propres certitudes.

S
avoir qu'on a un TDAH, c'est un soulagement oui, et une colère immense aussi. Je l'ai mentionné dans le précédent article. Mais c'est aussi d'autres combats à mener. Celui de réhabiliter sa légitimité à être de ce monde, à avoir droit à du soutien. C'est le combat de repenser sa vie, de la recommencer presqu'à zéro. Si j'étais toute seule, je crois que j'aurais lâché la rampe. 
Quand vous avez un entourage proche sain et stable, ça rend le quotidien beaucoup plus supportable. Attention, ça ne veut pas dire que tout va mieux, ça évite déjà de se retrouver au fond du fossé. C'est un équilibre vital. Et cet équilibre émotionnel sain et stable, je ne l'avais pas eu depuis des années. 
Quand je suis sortie du new age, il y a quatre ans, j’ai constaté à quel point les disciplines pseudoscientifiques s’étaient approprié toutes les maladies et tous les troubles pour y répandre leurs inepties. On retrouve aujourd'hui ces discours dans les mêmes rayons que les ouvrages écrits par de vrais chercheurs, médecins ou psychiatres. Ce mélange entre science et pseudoscience crée une telle confusion qu’il n’est pas surprenant, parfois, de voir même de vrais psychologues relayer sur les réseaux des idées fausses : par exemple, que le TDAH serait systématiquement associé à la psychose, ou que le DSM-5 obligerait à traiter les personnes endeuillées trois semaines après un deuil. Dans une époque où il est devenu plus facile de diffuser des contre-vérités que de les réfuter, l’esprit critique est mis à rude épreuve.

Si le seul problème, c’était la pub autour du Safran comme “remplaçant” de la Ritaline, ce serait presque facile à gérer. Parce qu'en investissant le TDAH, les pseudosciences s'attaquent à la santé mentale et c'est un vrai problème. Il y a une vraie défiance envers la science, la médecine, peut-être encore plus vers les soignants. Pourquoi? Je crois que c'est multifactoriel.
Il y a tellement de personnes qui souffrent d'un mauvais accompagnement, d'un manque d'empathie, que lorsqu'elles voient des non professionnels de santé les rassurer là où la science pure et "froide" ne le fait pas, il est plus tentant de se tourner vers eux. 
Et c'est comme ça qu'on confond "aller mieux" et "se sentir mieux". 
Je peux me sentir mieux mais je ne vais pas aller mieux. 
On peut faire le parallèle avec la dépression. La dépression, ce n'est pas souffrir sans aucun temps mort. Aussi étrange que cela puisse paraître, je peux avoir des moments où je me sens bien. Mais je ne vais pas bien. Je le vois quand après un fou rire avec mon chéri, dans la seconde d'après, je me sens comme la pire des merdes. 
Quand je calme une crise d'angoisse par la respiration, je n'ai absolument pas réglé le problème de mon anxiété généralisé. J'ai calmé la conséquence et non la cause.

Préférer l’ostéopathie à la kinésithérapie n’est pas la meilleure solution, parce que l’ostéopathie repose sur des concepts non validés scientifiquement : c'est une pseudoscience.
À l’inverse, la kinésithérapie est une discipline médicale fondée sur des preuves, pratiquée par des professionnels formés à la compréhension du corps humain, des muscles et des articulations. Le ou la kiné établit un programme d’exercices et de rééducation adapté, mais la progression dépend aussi de l’investissement du patient. Après mon opération suite à la morsure du chat dont j'étais la tata, c’est grâce à la rééducation prescrite par ma kiné, et à mon implication entre les séances, que j’ai pu retrouver l’usage de ma main. Ce n’est pas au professionnel de tout faire : il guide, mais c’est au patient de s’engager activement dans sa propre guérison.

Ce qui revient souvent quand j'énumère cet argument, c'est que des personnes témoignent de l'efficacité des pseudosciences sur elles, et activent le biais de confirmation. L'effet placebo, on a beau le nommer, l'expliquer, ça ne passe toujours pas. Les personnes croient qu'on les attaque, elles, parce qu'elles exercent ces disciplines, et qu'on les considère comme dupes et naïves. Si c'est l'image que je renvoie dans ma vindicativité envers les pseudosciences, je m'en excuse. Ce n'est pas ce que je souhaitais faire ni dire. 
Je voudrais tant que ces personnes ne tombent pas dans le piège ficelé dans lequel n'importe qui peut tomber. 
En début d'année, m'a été diagnostiquée la maladie auto-immune de Hashimoto (maladie thyroïdienne), et je pensais naïvement qu'aller sur des groupes sur les réseaux sociaux me permettrait d'apprendre des choses sur la maladie et la gérer au quotidien. Mais, neuf posts sur dix tournent autour de la naturopathie, de la nutrithérapie, etc. Le problème, c’est que n’importe qui peut se proclamer naturopathe ou nutrithérapeute. Je n’ai pas envie de confier ma santé à des personnes qui n’ont pas derrière elles des années d’études de médecine et une véritable maîtrise des questions de santé humaine.

"Oui mais la science n'a pas vérité absolue!"

La science, par définition, n'est faite que d'apprentissage. La science d'hier n'est pas celle d'aujourd'hui et celle de demain, sera bien mieux que celle d'aujourd'hui. On ne peut pas critiquer la science parce que grâce à elle, on ne meurt plus du rhume, de l'appendicite, de la rougeole, et tant d'autres choses que j'ai la flemme de citer. Grâce à la science, on peut vivre plus longtemps, on comprend le fonctionnement de la biodiversité, du cycle de la vie, la formation des étoiles, des planètes... On comprend des choses qu'on attribuait autrefois à de la sorcellerie. Grâce à la science, on ne parle plus de folie mais de troubles psychiques. Grâce à la science, on peut traiter des cancers, on peut offrir des soins palliatifs, etc. 
La science se construit sur des erreurs et des remises en question : elle avance en formulant des hypothèses, constamment réévaluées à la lumière de nouvelles découvertes. Elle n’apporte jamais de certitudes définitives. Si certains médecins tiennent des propos catégoriques, il s’agit d’une erreur humaine, pas d’une défaillance de la méthode scientifique elle-même.

Oui, il y a encore des psychologues, des psychiatres qui ne connaissent rien aux troubles du neurodéveloppement et qui eux-mêmes ont des références pseudoscientifiques et je peux comprendre que cela embrouille complètement l'esprit des personnes qui ne savent plus trop vers qui se tourner. 
Que faire pour cela ? Je ne suis personne pour vous donner la recette magique. 

Peut-être que la clé, c'est de cultiver son esprit critique et de s’informer. C'est sain de reconnaître qu’on ne maîtrise pas tout, notamment en médecine, et ce n’est pas grave. Ce qui pose problème, en revanche, c’est de prétendre tout savoir mieux que les spécialistes sans avoir la formation nécessaire.

Je sais aussi que beaucoup de gens trouvent un refuge onirique dans le new age. On a besoin de rêver et de s'évader, mais ça aussi, on peut le trouver dans des disciplines comme l'art, le sport (si on aime le sport), la créativité. Et si on était acteur de sa propre créativité, ça aiderait peut-être aussi à se détacher de disciplines qui ne vendent rien d'autre que de l'illusion?...






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